La réputation de l’université parisienne ne séduit plus les étudiants européens. Malgré les efforts de l’administration, l’expérience leur laisse souvent un goût amer.
En décembre dernier, la Commission européenne a dévoilé le top 20 des établissements les plus prisés par les Erasmus. Parmi les lauréats figurent une quinzaine d’universités espagnoles et celle de Lund, en Suède. Pas de françaises au classement. Pas même la prestigieuse Sorbonne.
Peter, 23 ans, originaire de Cambridge, est arrivé en septembre dernier à Paris : « Sorbonne, de l’autre côté de la Manche, ça sonnait bien... j’ai vite déchanté . Quand j’ai débarqué à la Gare du Nord, le service Erasmus de l’université était encore fermé. Ce n’était que le début de la galère », raconte-t-il.
Obtenir une aide financière, trouver un emploi ou un logement, autant de démarches que les étudiants doivent mener seuls. « Pour mon studio, il me fallait un garant, explique Peter. En Angleterre, c’est la fac qui s’en charge. À la Sorbonne, ils m’ont répondu : débrouillez-vous ! » Ces obstacles, Giuseppe, originaire de Pise, en Erasmus à Paris IV, les connaît bien : « Pour un logement, il me fallait un compte en banque, mais pour ouvrir un compte, il me fallait un logement ». Il avait bien demandé au CROUS une chambre dans une résidence universitaire, mais c’était complet. En 2006 seulement trente étudiants Erasmus sur les 511 accueillis par la Sorbonne ont pu en bénéficier.
Sauvée par son prestige
« Et bravo pour l’accueil ! » Le jeune homme n’oubliera pas de sitôt son intégration ratée. « Le bureau Erasmus avait bien prévu un pot de bienvenue... mais pas avant décembre. J’ai dû prendre les choses en main. » Giuseppe a contacté par mail d’autres étudiants européens pour un rendez-vous dès le mois d’octobre, au Centre Pompidou (IVe) : « On était 150, tous plus perdus les uns que les autres ».
« Je sais bien que tout n’est pas rose ici pour mes petits Erasmus », concède Alfonso Mostacero, en charge des étudiants européens à Paris IV « Les démarches administratives sont longues. Ils se noient souvent dans la paperasse », avoue-t-il. À cela s’ajoute la barrière de la langue : « Nous proposons bien des cours de remise à niveau, mais les premiers arrivés sont les premiers servis : nous ne disposons que de cent places. » Impuissante, l’institution parisienne se veut néanmoins confiante car les étudiants sont unanimes : le tampon « Sorbonne » séduit leurs employeurs. « Même si l’étage Erasmus se transforme souvent en bureau des pleurs, admet M. Mostacero, je sais qu’ils demeurent fiers d’étudier à la Sorbonne ». Pour combien de temps encore ?
Un bon filon pour les boîtes de nuit
Ils viennent d’Espagne, de Slovénie ou du Danemark. Ils sont venus étudier un an à Paris, mais se sentent un peu seuls, un peu perdus. Heureusement, les « Erasmus Parties » sont là : pour eux, l’entrée est gratuite avant une heure du matin. Les organisateurs savent exploiter le filon : « Si vous voulez faire des progrès en langue, rencontrer d’autres Erasmus, c’est l’endroit idéal ! A l’entrée, n’oubliez-pas de prendre une étiquette avec le nom de votre pays, ça facilite les échanges », assure Alexis Chamart, organisateur de ces soirées au Planet Hollywood. Aujourd’hui, comme tous les jeudis, la discothèque des Champs-Elysées, s’apprête à recevoir un milliers d’européens, « pour une nuit endiablée » promet le tract distribué à la sortie des facs parisiennes. Surfer sur la mode de « l’Auberge espagnole » est le meilleur moyen pour eux de faire le plein. Le vendredi soir, c’est « Erasmus by night » à La Loco, discothèque du 18è arrondissement : 70 000 étudiants par an, qui, certes ne payent pas l’entrée, mais consomment. Beaucoup même : « C’est notre plus grosse soirée de la semaine. », se félicite Sylvia Stranik, responsable de l’évènement.
Dominique Tenza
et Julie Peyrard