La reconstitution des faits qui avait lieu dimanche à Ajaccio n’a pas éclairé les zones d’ombre qui demeurent sur l’assassinat du préfet Erignac, laissant les parties civiles et la défense camper sur leurs positions respectives.
Cela faisait quatre ans qu’il n’avait plus mis un pied en Corse. Yvan Colonna a été transporté dimanche à Ajaccio (Corse du Sud), pour assister à la reconstitution des faits que lui et ses avocats n’ont cessé de réclamer durant des années. La cour d’assises spéciale de Paris a donc décidé de faire le déplacement : en tout, une quarantaine de personnes se sont données rendez-vous à la gendarmerie de Pietrosella (Corse du Sud) puis dans la rue du Colonel Colonna d’Ornano, à l’endroit même où le préfet Erignac a été abattu le 6 février 1998, près du théâtre Kalliste où il devait se rendre. Yvan Colonna était bien présent, en qualité d’observateur, puisqu’il refuse de participer à une reconstitution de faits auxquels il n’aurait jamais pris part. La famille Erignac de son côté n’a pas voulu se déplacer pour assister à ce qu’elle considère comme une perte de temps et d’argent.
La défense avait souhaité un déplacement sur les lieux de l’assassinat afin d’infirmer la thèse de l’accusation selon laquelle trois hommes ont été vus sur les lieux du crime le soir de l’assassinat. Une thèse qu’un témoin oculaire réfute, affirmant n’avoir aperçu que deux hommes. Après avoir passé un peu moins d’une heure sur les lieux, le cortège est reparti en direction de l’aéroport, laissant les avocats de la défense et ceux des parties civiles camper sur leurs positions initiales. Pour Me Pascal Garbarini, avocat d’Yvan Colonna, la reconstitution a permis « de voir qu’il y a beaucoup plus de thèses que celles de l’accusation ». Pour Me Benoît Chabert, avocat de la famille Erignac, « il est clair que si un troisième homme se trouvait caché un peu plus loin à gauche, il était invisible, donc la thèse [de deux hommes] est infirmée. »
Une reconstitution sous haute surveillance
A l’occasion de ce transport sur les lieux, la ville d’Ajaccio a connu un véritable état de siège. Environ cinq cents policiers et gendarmes ont quadrillé le quartier du Kalliste, barrant l’entrée des rues, demandant aux résidents de rester chez eux. Des tireurs d’élite cagoulés placés sur une grue, balayant la scène avec leur jumelles près à intervenir à tout mouvement suspect avaient de quoi inquiéter les Ajacciens. Depuis deux jours, tout le quartier avait été verrouillé par les forces de l’ordre. Le huis clos ordonné par la cour n’a pas pour autant été respecté. Les passants se sont massés derrière les barrières métalliques, les habitants de la rue du Colonel Colonna d’Ornano ne sont pas passés à côté du spectacle non plus. Sommés de rester chez eux, ils ont pu assister à l’audience publique depuis leurs fenêtres ou leur balcon. Un spectacle à gros budget, puisqu’il aura coûté entre 100 000 et 180 000 euros.
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