L’usine automobile supprime un emploi sur trois et s’implante en Tunisie. Le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation ne sera d’aucune aide pour les salariés.
Un véritable désastre pour le bassin d’emploi. Un grain de sable à l’échelle européenne.
Metzeler, le sous-traitant automobile spécialisé dans les joints d’étanchéité, situé à Charleval (Eure), transfère ses ateliers de finitions en Tunisie. Les 310 salariés, du deuxième employeur de la région, seront licenciés dans le bassin industriel de la vallée de l’Andelle, à une trentaine de kilomètres de Rouen (Seine-Maritime).
L’UE vient de créer, le 1er janvier 2007, le Fonds européen d’ajustement à la mondialisation (FEM) pour dédommager les salariés victimes de délocalisation. Mais Metzeler, le poumon économique de la vallée, n’y aura pas droit. Pourtant mille salariés répartis sur 180 communes y travaillent. « Des familles entières vont souffrir » déclare, dépité le maire communiste de Charleval, Daniel Bellavoine.
La fatalité s’impose
Les critères européens du FEM sont très contraignants. Pour déclencher les aides à la formation ou à la réinsertion professionnelle, l’entreprise, la région ou le secteur visé doivent avoir subi un minimum de mille licenciements. Il faut encore prouver que ces suppressions d’emplois « résultent directement de la mondialisation caractérisée notamment par des pertes de parts de marché », souligne encore le FEM. Metzeler, comme beaucoup de PME, ne répond à aucun de ces critères. La détresse des familles de l’Eure n’y changera rien.
Pour Alain Leguen, délégué syndical FO, le problème est ailleurs : « L’usine manque de compétitivité. La main-d’œuvre coûte 4€ de l’heure en Tunisie contre 21 en France. » Cette situation rend Jean-Louis Destans, président du Conseil général, fataliste : « On ne peut pas y faire grand chose. Nous sommes attentifs aux aides de l’Europe, mais le FEM ne nous sera d’aucune utilité. »
Présenté en grande pompe par les parlementaires comme « une avancée significative vers l’Europe sociale », le FEM laisse désarmés les responsables politiques et syndicaux locaux.
La Tunisie, nouvel eldorado pour les sous-traitants automobiles
En Tunisie, la région de Sousse (au sud de Tunis) a acquis une solide réputation dans le domaine automobile. Huit milles ouvriers y travaillent pour des sous-traitants européens qui fournissent Renault, Audi ou Volkswagen. Mais les autorités locales ne veulent pas en rester là.
A Sousse, un technopole spécialisé dans la mécanique et l’électronique a été mis en place avec l’aide de la Banque européenne d’investissement qui subventionne cinq projets (dont celui de Sousse) pour 80 millions d’euros. « Notre but est d’attirer encore plus d’entreprises sur notre site », déclare Karim Zaghdane, sous-directeur du technopole. Les constructeurs européens peuvent compter sur une très faible taxation à condition que leur production soit réexportée à hauteur de 70%.
On attend les premières entreprises avant la fin de l’année.
Vincent Amiot - Guilhem Garrigues - Julien Landry